ET LISEZ RECLUS 3 Feng Jicai
Fenêtres...
« Pendant cette période, la contemplation de ce qui se trouvait au-delà de la fenêtre a été mon seul divertissement, mon unique consolation. J’avais calé mon oreiller avec des livres afin qu’il soit très haut et que mon regard puisse embrasser les contours de la fenêtre. N’importe quel encadrement de fenêtre peut devenir le cadre d’un tableau vivant.(…) L’art transfigure la banalité de la vie."
Celui qui s‘exprime ainsi c' est Hua Xiayu, un peintre persécuté par la Révolution culturelle, héros du roman Que cent fleurs s’épanouissent de l’écrivain chinois Feng Ji Cai. (ou Feng Jicai ou Jicai Feng)
Cet écrivain appartient au mouvement "Littérature des cicatrices", nécessaire reconstruction après les traumatismes de la Révolution culturelle (dans les limites permises par la censure, tout de même).

Ne vous fiez pas au fait que ce roman soit classé en littérature jeunesse . Il est lisible par tous, à partir de l'adolescence. Les romans contemporains publiés sous l’étiquette « Jeunesse » sont souvent de qualité, ce qui hélas n’est pas toujours le cas dans d'autres collections. Je reviendrai d'ailleurs un autre jour sur ce sujet.
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Nationalité : Chine Né(e) à : Tianjin , 1942 Biographie : Feng Jicai est né en mai 1942, à Tianjin, dans une famille de lettrés. Il rentre en 1962 à l'Ecole des Beaux-Arts de Tianjin. Il aim...
Pour en savoir davantage sur cet auteur, écrivain, peintre et calligraphe.
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ou même "Feng Zicai", ce qui prête à confusion car il y a un auteur plus ancien qui porte ce nom.
En juin 1956, par le mot d’ordre « Que cent fleurs s’épanouissent », appelé aussi « Campagne des Cent Fleurs », Mao Zedong (1893-1976) « invite » tous les intellectuels et artistes à exprimer librement leurs opinions. Malheur à ceux qui, comme le héros de ce roman, ont cru naïvement à cette liberté d’expression ! Un an plus tard ils seront persécutés, exilés, torturés. Et dix ans après, la Révolution culturelle est chargée d’éradiquer les « Quatre Vieilleries » : la pensée, la culture, les mœurs et les coutumes de l’époque de Confucius. ». Une révolution -une guerre civile- qui a duré dix autres années et fait, estime-t-on aujourd’hui, entre un et trois millions de morts et cent millions de personnes persécutées.
Gardes rouges sur la place Tian'anmen à Pékin le 15 septembre 1966. Slogan : « Pas de fondation sans destruction »,
Hua Xiayu, brillamment diplômé de l’École des Beaux-Arts de Pékin, familier de la culture traditionnelle chinoise, comme de la culture européenne, et promis à un bel avenir artistique, est relégué à plus de 2000 km de chez lui, dans une usine de porcelaine à Qianxi, dans la province de Guizhou, particulièrement pauvre et reculée. Pourquoi ? il ne l’apprendra qu’à la fin de l’histoire. Victime d’un système qu’il ne comprend pas, il est soumis à l’autocritique et à diverses brimades, comme casser ses propres porcelaines et rester agenouillé sur les tessons. Et ce n'est pas le pire des supplices qu'il doit endurer...
Découpage traditionnel chinois (classé au patrimoine UNESCO) comme celui de "Ciseaux magiques" dans le roman.
Ce qui est magnifique dans ce roman, c'est que l'art, la vision colorée que Hua Xiayu pose sur les choses et sa résilience transfigurent tout. Un livre que je relis souvent, que je vous recommande absolument parce il est bien écrit avec une grande simplicité, qu'il est universel et donne courage et espoir.
« Vous ne trouvez pas cela bizarre ? Les gens qui me veulent du mal, par un moyen ou un autre, finissent toujours par m’aider. Vous pouvez me dire pourquoi ? »

Raoul Dufy, intérieur à la fenêtre ouverte, 1928.
"Une phrase [de Picasso] m’est revenue en mémoire : Le monde entier se déploie devant nous, impatient que nous l’inventions, non que nous le répétions. »

Pablo Picasso, Nature morte devant une fenêtre à St Raphaël, 1919.
« Celui qui regarde du dehors à travers une fenêtre ouverte ne voit jamais autant de choses que celui qui regarde une fenêtre fermée. Il n’est pas d’objet plus profond, plus mystérieux, plus fécond, plus ténébreux, plus éblouissant qu’une fenêtre éclairée d’une chandelle. Ce qu’on peut voir au soleil est toujours moins intéressant que ce qui se passe derrière une vitre. Dans ce trou noir ou lumineux vit la vit, rêve la vie, souffre la vie. »
Baudelaire, Les fenêtres, Petits poèmes en prose, XXXV.
Souvenir personnel d’un triste récit de ma grand-mère paternelle auquel la pandémie si contagieuse me fait repenser :
la fenêtre d’une petite chambre où mon arrière-grand-père était confiné : fragilisé par son métier- il possédait une entreprise de fleurs en tissu pour la mode et manipulait beaucoup de teintures- il avait attrapé la tuberculose. Aucun contact avec le reste de la famille. Totalement isolé. Tout ce qu’il avait touché était systématiquement désinfecté. Il n’a plus jamais embrassé ses enfants qui ne pouvaient que lui faire coucou de l’extérieur, quand il se tenait à la fenêtre de sa chambre. Il est mort en 1896 : ma grand-mère avait sept ans et mon grand-oncle quatorze.
Plus joyeusement :
À travers la fenêtre du deuxième étage d’une maison en face de la nôtre, nous apercevons depuis des mois, éclairé par la lueur de l’écran, le profil d’un grand ado, casque sur les oreilles, mains sur les manettes. Tôt le matin, tard le soir, toute la journée parfois.
S’étonnera-t-il dans quelques semaines : Le confinement ?! quel confinement ?
Je continue de ranger les bibliothèques et voici un bonus chinois (traduit de l'anglais) au rayon policier :

Si j'ai collé des étiquettes sur les 6 polards de QIU Xiaolong que je possède (il en a écrit davantage) c'est qu'il est intéressant de les lire dans l'ordre chronologique, non pour les histoires policières en elles-mêmes, mais parce que l'auteur décrit au fil des années les transformations des quartiers populaires, des villes, des comportements, des peurs, des risques ....
Prenez soin de vous.
Claude Léa, 31 mars 2020
Goethe à sa fenêtre à Rome .... Et vous ? Pouvez-vous profiter de ce confinement pour être créatif ?
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Prenez soin de vous et écoutez Station Simone.